Georges MASPERO

(Par E. Porée Maspéro)

né à Paris le 21 août 1872, mort à saint Tropez le 21 septembre 1942.

En la personne de Georges Maspéro disparaît l'un des plus anciens collaborateurs de l' Ecole Française d'Extrême-Orient: il en était, en effet, correspondant-délégué dès 1903, et membre d'honneur depuis 1930.

Georges naquit à Paris le 21 août 1872. Orphelin de mère, étant plus souvent en Egypte qu'en France, il était, dès sept ans, pensionnaire, d'abord au Lycée de Vanves, puis au Lycée Henri IV à l'âge où il fallut choisir une carrière, l'influence de Pierre Loti était telle qu'il choisit, avec plusieurs de ses camarades, une carrière qui l'emmènerait dans les pays exotiques auxquels Loti l'avait fait rêver. Entré en 1891 à l'Ecole Coloniale, il préparait en même temps une licence de droit, suivant également les cours de l'Ecole des Langues Orientales, dont il obtint les diplômes de chinois et d'annamite. II débutait dans la carrière administrative en décembre 1894 comme chancelier-stagiaire a Phnom Pén.

Six mois après son arrivée, Georges Maspéro devenait secrétaire particulier du Résident Supérieur, Huyn de Verneville, pour lequel il devait garder une sorte de vénération. En 1897, des intrigues de palais, dont on retrouve une version dans les "Souvenirs" de Paul Doumer, causèrent le remplacement de Verneville par Ducos. Georges Maspéro fut envoyé comme premier résident de la province de Kompon Spu', qui n'était jusqu'alors qu'un simple poste administratif.

Éloigné de Phnom Pén par vingt-quatre heures à dos d'éléphant, Georges Maspéro a hâte de tracer, puis de construire, une route sur Phnom Pén, qui le met bientôt en mesure de s'y rendre en quatre heures de cheval. Mais son habitation était construite sur l'autre berge du Prèk Thnot: parfois, passant à gué le matin, il retrouvait, le soir, le fleuve trop haut. Il aspirait à un pont.

Georges Maspéro, en 1901, était Résident de Kompn Cam. Ici encore, il est toujours en exploration, mais il ne demeure pas longtemps à ce poste, et part pour le Laos comme secrétaire particulier du Résident Supérieur, le colonel Tournier. C'était un homme d'un caractère tel que, malgré qu'il eut battu un record de durée, Georges Maspéro ne put demeurer plus de neuf mois auprès de lui. Ce court séjour fut cependant fécond. Georges Maspéro trouva à Vien Can des bronzes inscrits, qui sont au Musée de l'Ecole Française et, à Say Fong, trois stèles, dont deux en laotien furent traduites par lui et dont la troisième, l'une des fameuses stèles "des hôpitaux", était le premier témoignage que l'on eût de la puissance kmère en des régions aussi septentrionales.

Dorénavant, la carrière de Georges Maspéro se poursuit en Cochinchine. Administrateur de Can-tho' de 1903 à 1901, avant de rentrer en congé, il est adjoint, probablement à cause de sa connaissance des langues siamoise, cambodgienne et laotienne, au résident supérieur Morel, chargé de rechercher dans les archives de la Légation de France à Bangkok. Chef de la province de Hâ-tiên en 1905, il dirige la province de Biên-hoa de 1905 à 1910. Georges Maspéro aménage le centre même de Bien-hoa, perçant de nouvelles rues, construisant la gare, installant l'éclairage à l'acétylène, établissant une société des courses, et lui donne son premier règlement de police et de voirie.

En 1910, Georges Maspéro est nommé chef de la Province de Soc-trang. Sa principale réalisation y fut un canal qui porte son nom. A Mi-tho, où Georges Maspéro est administrateur de 1912 à 1913, une de ses créations a connu la fortune, celles de la première Caisse de Crédit Agricole Mutuel. Georges Maspéro propose une organisation adaptée aux besoins du pays, et, ses propositions étant sanctionnées par un arrêté, fonde la caisse et le syndicat de Mi-tho qui "resteront pendant plusieurs années les seuls organismes existant de Cochinchine" et qui, incorporés de nos jours à un plus ample organisme de Crédit Mutuel, en furent le premier noyau.

En 1914, la guerre surprend Georges Maspéro en congé. De la Réserve territoriale, il est employé à creuser des tranchées, ce qui réveille une ancienne "fièvre des bois" contractée lors d'explorations dans la chaîne des Cardamones. Il est alors versé au Conseil de Guerre de Paris. Ayant surveillé l'impression de sa "Grammaire khmère" pour laquelle il fallut fondre des caractères cambodgiens, il obtint de repartir pour l'Indochine à la fin de 1915.

II est Résident-Maire de Haiphong jusqu'en juillet 1918. La difficile situation financière de la ville ne permet que de modestes travaux d'assainissement et d'embellissement.

De 1918 à 1920, Georges Maspéro remplit les fonctions de gouverneur intérimaire de Cochinchine.

En mai 1920, nommé pour l'intérim de Résident Supérieur au Cambodge, il espérait avoir un certain temps la direction de ce pays où il avait débuté, et avait aussitôt tenté de le moderniser. Titularisé Résident Supérieur à la fin de 1920, Georges Maspéro rentre en France pour remplacer Pierre Pasquier comme représentant du Ministère des Colonies dans la commission chargée d'élaborer des contre-propositions au sujet de traité de commerce et de protocole juridictionnel que le Siam avait remis à la France en 1919.

En 1921, il devint président du du conseil de la Banque Industrielle de Chine. Dès lors, Georges Maspéro est entraîné dans une vie nouvelle. Les affaires s'accumulent, les sociétés dont il fait partie deviennent de plus en plus nombreuses.

En 1936, il est fait commandeur de la Légion d'honneur et élu membre de l'Académie des Sciences Coloniales. Membre du Conseil Impérial, il donne toujours le meilleur de lui-même à l'Indochine. Chez lui, il travaille à la troisième édition de "La Chine", au dictionnaire môn-français qu'il pense terminer lorsqu'il se retirera de la vie active...

Il assure la liaison entre Paris où est le siège responsable, et Marseille, devenue le véritable centre d'activité. Les crises d'asthme et les bronchites se succèdent sans l'arrêter dans sa tâche. Mais un cancer au poumon s'étant déclaré, et le traitement s'étant avéré inefficace, il quittait Paris en Juin et mourrait à saint Tropez le 21 septembre 1942, à l'âge de 70 ans. Il avait souvent dit que la cessation de vie active qu'apportait la vieillesse lui paraissait une calamité: il ne cessa que lorsque la maladie l'y contraignit et, jusqu'au bout, travailla en bon Français.